Les Nouveautés : 1970-2007

Beaucoup de Lyonnais n’en reviennent toujours pas…La librairie des Nouveautés ferme ses portes à la fin du mois d’octobre. Pire encore, cette librairie emblématique de la place Bellecour, située en pleincentre de Lyon, ne sera pas reprise et disparaîtra « au profit » d’une banque.1970-2007, fin de l’histoire. Trente-sept années de service pour Robert Bouvier, et c’est « le coeur serré » qu’il quitte « cette très belle et très honorable vieille dame ». Une fameuse santé à un peu plus de cent vingt ans. Car c’est déjà une librairie que Robert Bouvier rachète en 1970. Elle a tout d’abord fait partie d’une Librairie-imprimerie-gravures (un classique du début du XXe siècle), avant d’appartenir à un psychiatre lyonnais. En 1970, après avoir fait ses armes à La Proue, auprès des frères Péju, créé la librairie Feuilles vives puis tenu la librairie du Parc – entre 1968 et 1970 –, Robert Bouvier trouve enfin
sa « passion amoureuse ». Il ne résiste pas et s’installe Place Bellecour. Au bout de près de quarante ans de vie commune, après plus de deux mille signatures, qui disent combien les Nouveautés sont toujours restées un lieu d’échange et de rencontre, mais aussi un lieu de diffusion intellectuelle, le libraire avoue « un sentiment d’usure ». Son constat est sans appel : une clientèle qui vieillit et pas de relais trouvé avec les 18-30 ans, qui entrent plus difficilement dans les librairies ; une boulimie de la production éditoriale et littéraire qui poursuit sa course à la surproduction ; les conséquences d’Internet… « Le paysage du livre a des allures de monde finissant », commente sereinement Robert Bouvier, avant de revenir à ce qui ne cesse de l’occuper : « une librairie est une aventure personnelle, une passion amoureuse. Si on regarde la comptabilité, on choisit de ne pas en ouvrir une. » Lui a donc décidé de fermer la sienne, après avoir, estime-t-il, fait des efforts pour rendre possible une reprise. Cela n’aura pas suffi. Les étagères se vident, les clients entrent sans cesse et trouvent difficilement les mots. L’émotion est palpable. Le dernier invité pour une signature aura été Laurent Rey, le 28 septembre. Son livre s’intitule Grammaire du désastre. Et c’en est un de voir disparaître ces vitrines de plus d’un siècle, ce haut lieu du
livre et de la littérature en plein centre-ville. Mais le libraire ne veut pas d’atermoiement. « Je pars en disant merci », conclue Robert Bouvier.
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Par Laurent Bozon. Livre et lire